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Balade dans le patrimoine

Publié le 25 février, 2022

Les journées rallongent. Les températures extérieures se font de plus en plus clémentes. Une promenade m’interpelle. Nonchalamment, je quitte mon quartier, Beaconsfield. J’emprunte le Lakeshore et ses quelques sentiers qui longent le plan d’eau. Au loin, j’aperçois la pointe, coiffée de son clocher fièrement dressé vers le ciel impétueusement bleu ce jour-là, qui s’avance sur le majestueux Lac St-Louis.

Instinctivement, mes pas me guident vers mon coup de cœur : le village de Pointe-Claire dans l’Ouest-de-l’Île. Ma relation affective avec cet endroit se décline en autant de raisons qu’il en faut pour alimenter une passion.

Mon regard se pose sur la splendide maison d’époque qui tel un précieux vase voit s’éclore les bouquets du fleuriste Westmount qui a pignon sur rue depuis plus de quarante ans dans l’Ouest-de-l’Île. C’est une belle entrée en matière que d’arriver dans le village comme si on ouvrait les portes donnant sur le jardin.

Sur le chemin Lakeshore bordé d’édifices, l’ancien et le contemporain délimitent le cadre. La murale colorée représentant la vie d’antan sur un côté du marché Épicure nous donne l’impression de marcher à travers une toile. En avançant ainsi vers le passé, Pointe-Claire s'anime.

La petite place juste devant l’un des meilleurs restaurants du coin, Le Gourmand, incite à la conversation. Plus loin, la rue Cartier, prise d’assaut par les touristes autant que par les citadins, les cafés qui n’attendent que le dégel pour voir débarquer les cyclistes et les marins d’eau douce le temps d’une pause, les boutiques d’antiquités qui côtoient celles de vêtements vintages et de prêt-à-porter, les rues transversales aux noms sanctifiés, tout témoigne d’un legs qui s’est dignement transmis d’une génération à l’autre. C’est à la fois une escapade à travers les époques et le témoignage de deux cultures qui ont appris à marcher main dans la main, même si quelques établissements notoires du secteur gardent entre leurs murs le souvenir de moments éméchés au cours desquels on réglait les divergences d’opinion à coups de poing.

D’ailleurs, je me souviens du Clyde’s (duquel je sortais quelquefois sans me rappeler grand-chose) où on enfilait les pintes de bières plus vite que les boules sur la table de billard! La vocation d’abord hôtelière de cet édifice datant du début du XXème siècle a plusieurs fois changé d’appellation. De l’Hôtel Pointe-Claire à celui qu’on a baptisé Pionnier avant et après le Clyde’s, l’établissement a été plusieurs fois reconverti pour ensuite troquer son parement de planches brunes et sa vocation contre un édifice à condos, au grand désespoir de ceux qui ont intercédé à plusieurs reprises pour préserver cette institution patrimoniale de Pointe-Claire.

Ma promenade se poursuit sur la rue St-Joachim où les effluves de la pizza de chez Gigi invitent à la tentation. Luttant contre mes gourmands démons en me promettant d’y retourner sur le chemin du retour, je continue vers la presqu’île de la Pointe-Claire. De là, l’emblématique Moulin Banal qui est aussi le symbole de la ville de Pointe-Claire, s’impose en survivant puisqu’il constitue l’un des dix-huit moulins encore présents dans le décor de l’Île.

S’offrant au Lac St-Louis, l’église St-Joachim ainsi que son presbytère, s’imposent paradoxalement dans toute leur magnificence et humilité stoppant le temps pour que j’y reprenne mon souffle. L’endroit est spectaculaire! On dirait qu’il rend un éternel hommage à l’œuvre de ceux qui ont bâti et reconstruit ces monuments au fil du temps.

Aussi, non pas que je veuille vous contaminer d’un blog à l’autre avec cette enquiquineuse pandémie bien actuelle, d’autant plus qu’elle sort du cœur du village de Pointe-Claire, mais son ancêtre la grippe espagnole est à l’origine de l’un des patrimoines toujours aussi présents dans le paysage de la côte ouest de l’Île.

En effet, alors qu’une virulente épidémie de ce virus sévissait à l’époque, le prospère marchand (un des aïeuls de notre famille) Edmond Morin, avait juré devant Dieu de faire construire une chapelle si ses onze enfants en étaient épargnés. Son souhait ayant été exaucé, il a honoré sa parole et fait ériger en 1918 ce lieu de culte catholique sur le terrain de la résidence familiale sise sur le Lakeshore. Depuis lors, la maison a été détruite pour céder la place au Centre Bayview en 1962, ce qui a valu à la chapelle d’être déplacée au fond du terrain et ainsi non seulement les résidents du Centre peuvent encore aller s’y recueillir, mais les automobilistes peuvent également apercevoir sa cloche qui surplombe l’autoroute Jean Lesage.

Sur ce, je vous invite à enfiler vos chaussures de marche, à enfourcher votre vélo ou à emprunter le lac en kayak ou en raquettes, selon la saison, afin que vous aussi puissiez découvrir un autre bijou qui a pour écrin l’Ouest-de-l’Île.

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